Agression de Ghaza en janvier 2008
Un crime de guerre
Israël est accusé de «crimes de guerre» et de «crimes contre l'humanité» suite à l'attaque militaire qu'il a dirigée contre la population désarmée de la bande de Ghaza entre le 27 décembre 2007 et 18 janvier 2008. Israël fait tout pour enterrer ce rapport au sein de l'ONU. Il fallait oser.
Une mission d'enquête de l'ONU a rendu public mardi un rapport accablant pour l'Etat hébreu, accusé de crimes contre l'humanité à la suite de l'agression militaire dont a été victime la population de la bande de Ghaza entre fin décembre et la mi-janvier 2008.
«Des actes assimilables à des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, des crimes contre l'humanité ont été commis par les forces armées israéliennes», a déclaré le président de la mission, le juge sud-africain Richard Goldstone, lors d'une conférence de presse à New York.
Cette mission a souligné notamment qu'aucune preuve ne permet de confirmer les accusations d'Israël selon lesquelles les combattants palestiniens avaient utilisé les civils comme boucliers humains. Israël a «fait un usage disproportionné de la force» et «violé le droit humanitaire international», dit le rapport.
L'offensive israélienne a été déclenchée en prétextant des tirs de roquettes palestiniennes contre l'Etat hébreu, qui sont également assimilés par le rapport à des «crimes de guerre» et «peut-être contre l'humanité», car dirigés sur des zones vides de tout objectif militaire.
«Quand il n'y a pas de cible militaire claire et que des roquettes et obus de mortier sont lancés sur des zones civiles, cela revient à une attaque délibérée contre la population et constitue des crimes de guerre et peut-être contre l'humanité», affirme le rapport.
Selon les conclusions de la commission, l'Etat hébreu «ne s'est pas entouré des précautions nécessaires requises par le droit international pour limiter les pertes en vies humaines, les blessures occasionnées aux civils et les dommages matériels».
Il cite «les tirs d'obus au phosphore blanc sur les installations de l'UNRWA» (agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens), «la frappe intentionnelle sur l'hôpital Al-Qods à l'aide d'obus explosifs et au phosphore» et «l'attaque contre l'hôpital Al-Wafa» comme autant de «violations du droit humanitaire international».
«Il y a eu de nombreux cas d'attaques délibérées contre des civils ou des édifices civils (individus, familles, maisons, mosquées) en violation du principe de distinction inscrit dans le droit humanitaire international», dit encore le document, selon lequel «des attaques ont été lancées par Israël avec l'intention délibérée de répandre la terreur parmi la population».
Les forces israéliennes ont «commis des destructions sur une large échelle de résidences privées, de puits et de citernes d'eau, de manière illégale. Israël a également ignoré l'inviolabilité des locaux des Nations unies et ceci est inacceptable», ajoute le texte. La mission, précise-t-on, n'a trouvé aucune preuve que des groupes palestiniens aient dirigé des civils vers les zones attaquées, ni qu'ils aient «participé aux combats habillés en civil».
Ce que craint Tel-Aviv Comme il fallait s'y attendre, Israël a ouvert hier les hostilités contre les conclusions de cette commission. «Nous mobiliserons nos amis à l'ONU, notamment les Etats-Unis et divers pays européens, pour que ce rapport soit purement et simplement enterr», a déclaré à la radio militaire le vice-ministre des Affaires étrangères.
Le porte-parole des Affaires étrangères a expliqué qu'Israël allait déployer des efforts tous azimuts «pour bloquer et contrer les effets nocifs et pervers du rapport de la commission Goldstone».
Au pays de Shimon Peres, on craint qu'à l'initiative de pays arabes, ce rapport accablant soit soumis au Conseil de sécurité de l'ONU, et que ce dernier décide ensuite de le transmettre à la Cour internationale de Justice (CIJ) de La Haye, indique un officiel anonyme cité par le quotidien Haaretz.
Dans ce cas de figure, la CIJ pourrait vouloir juger des dirigeants politiques ou des chefs militaires israéliens impliqués dans l'opération «Plomb Durci» contre Ghaza, et émettre à cette fin des mandats d'arrêt internationaux. «Nous allons faire tout notre possible pour empêcher qu'il y ait des suites juridiques à ce rapport en démontrant qu'il est malhonnête et politiquement biaisé», a affirmé à la radio publique l'ambassadrice d'Israël auprès de l'ONU.
L'autorité palestinienne n'a pas encore commenté ce rapport, mais le mouvement Hamas, qui contrôle la bande de Ghaza, l'a dénoncé mardi soir. «C'est un rapport politique, déséquilibré et malhonnête, dans la mesure où il met sur le même plan ceux qui commettent des crimes et ceux qui résistenté, a déclaré un dirigeant du Hamas à Ghaza.
Djamel Chafa/Agences
Israël aux portes du Tribunal de La Haye
Israël est aux portes du Tribunal de La Haye. Le rapport remis aux Conseil de sécurité par le juge sud-africain Richard Goldstone, chef de la mission d’enquête des Nations unies sur les bombardements de Ghaza qui ont fait 400 morts
dont une grande majorité de civils et d’enfants palestiniens rend, logiquement, plus grande l’éventualité d’un procès international contre les dirigeants israéliens accusés de «crimes de guerre». Une accusation qui très certainement sera considérée par la justice internationale, si aucune entrave ne vient paralyser son cours de «crimes contre l´humanité».
L’enquête de l’Onu a démontré ce que tout le monde savait. L’offensive militaire israélienne de la fin de l’année dernière a été dirigée contre la population civile palestinienne dans sa totalité. Les enquêteurs n’ont eu d’ailleurs aucune difficulté à apporter la preuve de ce qu’ils savaient sur ce cas de crime contre l’humanité.
Les images rapportées directement par toutes les chaînes de télévision du monde le prouvent, malgré le blocus médiatique exercé par l’armée israélienne sur la zone des bombardements des objectifs civils, sans aucun discernement, y compris contre les locaux des Nations unies.
Bien des juges honnêtes en Europe ont vainement tenté de mettre la communauté internationale devant ses responsabilités à travers l’ouverture d’un procès transparent sur ce qui s’est passé à Ghaza. Bien des gouvernements aussi, dont celui de José Luis Zapatero, ont tenté de bloquer l’implication de la justice nationale au motif que les Etats concernés sont habilités à ouvrir des enquêtes sur ce qui est survenu sur leur territoire.
Dans le cas de Ghaza, il faudrait donc, de ce point de vue, faire confiance à la justice israélienne ou attendre la création du futur Etat palestinien. Le juge sud-africain, ancien procureur général des tribunaux internationaux qui ont dicté des sentences sur le génocide au Rwanda et la guerre de Yougoslavie a menacé de remettre son rapport au Tribunal international de La Haye si Israël continuait de refuser de coopérer avec la mission de l’Onu sur le cas de Ghaza.
Les autorités israéliennes, elles, n’ont jamais réservé bon accueil à cette mission et encore moins à son rapport qu’il a qualifié de «nauséabond». Les dirigeants israéliens sont mis, aujourd´hui, devant un choix :
ou accepter une commission d’enquête indépendante ou aller devant le tribunal international. Il est peu probable que le gouvernement israélien opte pour la seconde position qui serait suivie, en cas de procès, d’un mandat d’arrêt international contre les accusés.
Ce rapport est mal tombé pour le gouvernement Netanyahoo qui essaie de gagner du temps face aux pressions de l’administration américaine qui exige le gel des colonisations juives en Cisjordanie pour permettre la relance du processus de paix au Proche-orient.
Hier, mercredi, le premier ministre israélien n’avait toujours pas répondu aux démarches dans ce sens de George Mitchell, l’émissaire de Barack Obama. Il faudra attendre, vendredi, pour savoir si les pressions américaines sur l’Etat hébreu ont été assez fortes.
H. A.
Conséquence du génocide et du blocus israélien Les Palestiniens de Ghaza gagnés par le suicide
C'est terrible ce qui arrive aux populations palestiniennes de la bande de Ghaza, depuis la guerre génocidaire de l'hiver dernier, pratiquée contre eux par Israël et la poursuite sans état d'âme du blocus. Et un malheur n'arrivant jamais seul, le conflit qui oppose le Hamas et le Fatah rajoute à la tragédie des Ghazaouis.
Depuis quelques mois, les autorités assistent impuissantes, à un nouveau phénomène : de plus en plus de Palestiniens qui vivotent dans cette immense prison à ciel ouvert, tentent de mettre fin à leur existence et beaucoup hélas réussissent. La police palestinienne de Ghaza a recensé depuis janvier denier, une centaine de cas de tentatives de suicide. La population ici est fondamentalement pieuse.
Si les habitants de Ghaza recourent à cet acte extrême, que doit s'interdire tout musulman, c'est que rien ne va plus. Le désespoir a gagné les esprits de la majorité des Ghazaouis, qui souffrent en silence aujourd'hui, au vu et au su du monde impuissant à faire changer d'avis le bourreau israélien qui inflige une punition collective à une population ayant choisi les islamistes du Hamas lors des élections de 2006.
Le directeur de la planification et des études techniques de la police à Ghaza Omar Abou Amra compte déjà sept personnes qui ont mis fin à leur vie, sur 95 cas de tentatives de suicide. «Nous avons relevé que les cas de suicide sont en hausse et le phénomène a tendance à s'exacerber», craint-il.
Un psychologue palestinien impute la recrudescence du suicide dans la bande de Ghaza à la situation économique en premier mais aussi à des problèmes familiaux. Selon un autre psychologue, la société palestinienne dans la bande de Ghaza vit une situation singulière marquée par la pression psychologique et celle économique.
«Les gens ici n'arrivent pas à s'adapter socialement, ce qui poussent certains à mettre fin à leur vie», explique-t-il. «De plus, ajoute-t-il, le chômage qui s'est aggravé au sein de la population, a rajouté des doses de pression conduisant à la solution finale chez les plus vulnérables». Des sources officielles palestiniennes et étrangères indépendantes estiment à 90% le taux de chômage qui frappe la population de Ghaza.
La dernière guerre menée par Israël contre le territoire palestinien enclavé a détruit 700 entreprises palestiniennes causant des pertes financières estimées à 140 millions de dollars. Le secteur agricole principale ressource des habitants du territoire a perdu pour plus de 170 millions de dollars.
Le gros des agriculteurs sont ruinés aujourd'hui, d'autant que l'armée israélienne a détruit au blindé et à la pelleteuse plantations, arbres, animaux et maisons, sans parler des assassinats contre les personnes sans défense. Ces données ne semblent pas refléter la réalité à sa juste valeur. Terreau fertile au suicide Selon un rapport de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) publié la semaine dernière, la guerre contre la population de Ghaza de l'hiver dernier, «a causé des pertes économiques de 4 milliards de dollars».
Le rapport estime que «la situation actuelle est la pire que la bande de Ghaza ait connue depuis 1967 sur les plans sécurité économique et conditions de vie».
La Cnuced regrette que «malgré l'annonce à la Conférence de Charm El Cheikh en mars 2009, de 4,5 milliards de dollars de dons destinés à soutenir le plan de redressement, aucun fonds n'a encore été débloqué».
En cause, les divisions entre le Hamas maître à Ghaza, et le Fatah, qui contrôle l'autorité palestinienne en Cisjordanie. En 2008, l'économie palestinienne a perdu du terrain pour la neuvième année consécutive, signale l'organisme onusien pour qui «si la croissance économique est restée positive avec un taux de croissance du PIB de 2% (contre 4,9% en 2007), le PIB par habitant a subi un recul de 1,2%».
Israël est le principal responsable de ce désastre, même si les dirigeants palestiniens obnubilés par le pouvoir y contribuent. L'entité sioniste a programmé tout cela en vue de tuer le Palestinien à petit feu.
La mise à sac de l'économie locale palestinienne pensée dans les officines israéliennes prépare le terreau propice à faire naître le désespoir et la résignation du plus grand nombre dans la bande de Ghaza, un pénitencier encerclé de toutes parts.
Le psychologue palestinien précise que de nombreux chefs de famille n'ont plus à présent les capacités et les moyens de subvenir aux besoins des leurs et se trouvant ainsi face à des horizons bouchés ont perdu la capacité de raisonner, pour dévier vers l'irréparable».
Selon lui, «les divisons politiques qui s'exacerbent entre factions palestiniennes ont rajouté à la tension sociale ambiante et fortifié l'impasse politique». «Politiquement, nous sommes à présent divisés entre frères, entre cousins», explique Mohammed Moussa, un intellectuel de Rafah, cité par un média occiental. «On ne se marie plus entre familles affiliées à l'un ou l'autre mouvement. C'est presque plus terrible que tout le reste.
Nous sommes devenus nos propres ennemis. On se méfie les uns des autres.» Beaucoup de jeunes filles désespèrent de l'avenir, et si elles n'arrivent pas à trouver le salut dans la foi, ne trouvent pas d'autres choix que d'en finir une bonne fois pour toutes avec cette vie sans perspectives. Le FMI y va également de son bilan négatif et s'alarme de la situation dans ce territoire bloqué par Israël.
L'institution de Bretton Woods prévoit la poursuite du recul du PIB réel à Ghaza, arguant que «la croissance, qui devrait atteindre 1% en 2009,
sera absorbée» par celle de la population (+3% cette année) . Pour les experts du fonds, «la situation reste sombre dans la bande de Ghaza, soumise à un strict blocus de la part d'Israël et de l'Egypte».
La situation économique désastreuse du territoire influe bien évidemment sur tous les services sociaux, notamment la santé des Ghazaouis, déjà mise à rude épreuve, et qui périclite dangereusement, depuis la fin de la guerre, à cause de la persistance du blocus.
Une prison de haute sécurité Selon un rapport de la mission sanitaire spécialisée dans la bande de Gaza, de l'OMS, rendu public en mai dernier, depuis 2006, le blocus a eu les effets sanitaires suivants : «stagnation de l'espérance de vie, aggravation de la mortalité du nourrisson et de l'enfant, retard de croissance dans l'enfance». Pour les experts de l'OMS, «la santé mentale des populations bloquées est maintenant affectée.
On observe par exemple chez 30 % des élèves des écoles des conséquences importantes de leurs expériences sur la santé mentale, avec des répercussions potentiellement sérieuses pour l'avenir, en termes d'absence d'engagement, d'aliénation et de comportements violents et destructeurs».
Pour isoler les Palestiniens de Ghaza qui ont voté pour «un mouvement terroriste», les Israéliens ont construit autour de cette étroite bande côtière une clôture électrifiée infranchissable, surveillée par des caméras et parcourue par des patrouilles.
Les témoins étrangers qui arrivent à se rendre à Ghaza, voient que «les points de passage sont d'étroites portes gardées comme celles d'une prison de haute sécurité : Erez, tenue par Israël, et Rafah, contrôlée par les Egyptiens».
Pour un journaliste français d'un journal de droite, «les marchandises entrent par deux points, Kerem Shalom et Karni, au gré d'un blocus tatillon qui organise une pénurie permanente et imprévisible».
Ce témoin poursuit que «la mer n'offre qu'une illusion de liberté. Sur la plage, des adolescents surfent ou nagent dans les vagues. Mais les pêcheurs qui sortent du port circulaire de Ghaza dans leurs barques jaunes ne peuvent pas s'éloigner du rivage sans essuyer les tirs d'un patrouilleur israélien qui va et vient inlassablement sur l'horizon».
A Ghaza, la vie n'existe pas pour ainsi dire. Les jeunes happés par l'oisiveté n'ont pas de loisirs pour décompresser. En plus, tout est ruine dans cette immense prison où s'alignent des îlots de tentes dans lesquelles vivent des milliers de familles en regardant les ruines de leurs anciennes maisons.
Un drame omniprésent Les rigueurs du climat rajoutent à la malvie ambiante. L'alimentation des Ghazaouis vient des tunnels clandestins que des débrouillards creusent pour «importer» des marchandises d'Egypte contournant le blocus israélien et que le «grand frère» de l'Est bénit sous cape. Le pouvoir égyptien abhorre le mouvement islamiste qui contrôle la bande de Ghaza.
Les tunneliers seul espoir pour les Ghazaouis, exposent leur vie au danger tous les jours. Les dernières statistiques font état de 121 décès, le nombre de Palestiniens tués dans des effondrements accidentels ou consécutifs à des bombardements aériens israéliens des tunnels, qui alimentent quelque peu le territoire. C'est dire que la drame est omniprésent à Ghaza.
Un homme qui perd tous les membres de sa famille en même temps dans un raid israélien et qui se retrouve du jour au lendemain coupé de tout peut-il rester le même ?
Il faut rappeler qu'Israël a assassiné en trois semaines l'hiver dernier, 1419 Palestiniens dont 1167 étaient des «non- combattants», soit 918 des civils parmi lesquels 111 femmes et 318 enfants et 249 des policiers non impliqués dans les hostilités. Les proches de ces victimes ne seront plus les mêmes pour toujours.
«Le siège nous affecte tous, psychologiquement, politiquement et économiquement. Le pire est peut-être de n'avoir aucune perspective d'avenir, de devoir attendre, parqués comme des animaux», se lamente un Palestinien, qui ne fait que refléter le sentiment du plus grand nombre ici.
Tout est donc propice ici aux solutions extrêmes. Et ce n'est pas le dernier rapport onusien selon lequel «des actes assimilables à des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, à des crimes contre l'humanité ont été commis par les forces armées israéliennes ", l'hiver dernier, qui va redonner vie aux Palestiniens de Ghaza..
A. M.
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