Point Net Tout ça pour ça
«Le rapport de la commission d'enquête parlementaire sur la pénurie des produits de large consommation n'a rien apporté de nouveaux !» On le savait un peu, mais il a fallu que ce soit dit par quelqu'un qu'on n'attendait pas : le ministre du Commerce. Les Algériens, habitués à voir ce genre d'actions aboutir systématiquement dans l'impasse ou l'oubli, ont donc naturellement commencé par se poser des questions sur la pertinence de cette enquête.
Du scepticisme à l'indifférence, on en est maintenant à la rigolade. Il faut peut-être se rappeler que «la pénurie des produits de large consommation», on a estimé qu'il faut en parler «sérieusement» depuis le début de l'année en cours, quand la chose a été mêlée au mouvement de contestation. Il n'y a jamais eu de pénurie, à proprement parler, mais pour faire sérieux, il fallait ressortir la relation de cause à effet. Quand ce ne sont pas les mécanismes du marché, ce sont les pénuries qui génèrent les hausses de prix. Allons-y alors pour la pénurie. Le tout étant de dépolitiser l'atmosphère, on traitera… politiquement la crise en recourant au Trésor public, puis on va voir pour le reste, déterminer les causes, situer les responsabilités «et agir en conséquence». C'est du moins l'ambition de la commission d'enquête réclamée à cor et à cri, d'abord pour expédier la nature d'une colère de mauvaise conjoncture.
Une conjoncture tellement périlleuse que les députés devaient montrer qu'ils savent prendre leurs responsabilités ! Une fois le «travail» de la commission terminé, ce sont les députés eux-mêmes qui se sont posé la question sur la pertinence de leur… initiative. D'abord parce qu'ils ne devaient pas être très fier des résultats, ensuite, parce que son utilité politique n'est plus d'actualité, la contestation n'ayant pas eu les prolongements tant redoutés. Alors, on a fait du bruit sur les évidences, avant de suggérer carrément qu'il n'est peut-être pas si nécessaire de… rendre publiques les conclusions. Les évidences, c'est de disserter sur le fait de réserver la primeur au président de la République et avant ça sur les parties consultées pendant l'enquête ! Pour boucler la boucle, un vote en bonne et due forme pour décider si le rapport doit être publié ou non. Il a été finalement publié et tout le monde, le ministre du Commerce en premier, est parvenu à la même conclusion : tout ça pour ça. M. Benbada est même allé plus loin : «Le rapport était fondé sur une analyse que toute personne est apte à réaliser.» On le savait.
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