Point Net Les faux exemples
Comme s'ils venaient d'une autre planète, l'ENTV les exhibe comme des objets de curiosité. Motte homogène mais détachée d'un ensemble en décrépitude, ils sont présentés comme l'incarnation de la réussite par l'effort ou l'exemple de l'initiative heureuse. Des «jeunes», manifestement pas comme les autres.
Ils ont emprunté la même trajectoire du génie créateur ou de l'Ansej. Et ils sont sur les plateaux, beaucoup de plateaux dont certains ont été spécialement fabriqués pour étaler la prospérité que les autres, tout aussi «jeunes» n'ont pas pu atteindre. Ils sont censés faire bouger les lignes dans les espaces communs ou pour faire simple, «montrer la voie».
Mais qu'est-ce qui a donc pu se passer pour que d'aussi grandioses «dispositifs»censés changer les choses pour le plus grand nombre en soient réduits à leur portion congrue au point que la télé publique en devienne l'unique et laborieux promoteur ? Elle est plutôt singulière, cette attention qui extrait à la majorité, quelques exceptions heureuses, avec en plus une arrière-pensée culpabilisatrice évidente.
Et ce n'est même pas sûr que ceux qu'on désigne et fait parler pour l'exemple aient emprunté les mêmes sentiers que tout le reste, avec des chances identiques. Si tant est qu'ils ont bien réussi, la moindre des choses aurait été tout de même de «confronter leurs expériences» avec ceux qui ont connu des fortunes moins heureuses, sur les plateaux de télé et sur des espaces moins guindés.
Bien sûr, ceux qui ont «réussi» sont fatalement les meilleurs. C'est commode. Pour cacher l'indigence d'une entreprise -au sens large du terme-, l'inégalité des chances face à l'aide publique et plus grave encore, l'abandon à leur sort des plus faibles.
Dans l'«affaire», il n'y a pas que les jeunes hommes sélectionnés pour la télé qui sont des exemples de réussite, il y a aussi les créneaux d'activité qu'ils ont investis. Dans l'argumentaire, il n'y a évidemment aucune explication sérieuse à la rentabilité d'un secteur par rapport à un autre, il n'y a aucune preuve de savoir-faire à faire valoir, aucune performance professionnelle à donner en… exemple.
Seulement une… «réussite» ! Dans un pays où tout est à inventer, comme l'a pertinemment dit un homme d'affaires algérien installé au Canada, «on se demande comment on peut parler de chômage», d'abord, de créneaux ensuite, et d'exemplarité enfin. On en parle pourtant. On en parle beaucoup… à la télé.
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